portant réforme générale de la Ve République


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L'Unomie

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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi vise à donner une traduction institutionnelle concrète à la Déclaration des droits et responsabilités de la Nation et de ses membres (DDNM), dont elle suppose l’adoption.

Son titre Ier (articles 1er à 3) instaure trois nouvelles catégories d’institutions, matérialisant des notions centrales de la DDNM.

Le collège des oppositions au Gouvernement prévu par l’article 1er s’inspire notamment de l’article 8 de la DDNM. Il doit donner aux oppositions politiques une légitimité accrue ainsi que de nouveaux moyens de jouer utilement leur rôle au quotidien, de suivre l’action des différents ministères, de solliciter des informations fiables auprès de l’administration et de proposer aux citoyens des alternatives politiques en vue de futures alternances. À l’appui d’autres outils créés par la présente loi, notamment dans le cadre des procédures parlementaires et constitutionnelles, les rapports entre le Gouvernement et les oppositions pourront être assainis, en sanctionnant plus efficacement les manquements à la loyauté qui affectent la crédibilité des élus dans les démocraties parlementaires.

L’article 2 propose de réécrire le titre XI de la constitution, actuellement dédié au Conseil économique, social et environnemental (CESE), pour le consacrer plus largement à des états généraux de la République qui engloberaient, outre le CESE, d’autres lieux d’expression de la société civile (Conseil de l’éducation et de la citoyenneté, Conseil académique, scientifique et culturel et Conseil de l’information et du débat public). Ces institutions représenteraient les « autorités nationales autres que les pouvoirs constitués de l’État » désignées par les articles 6 et 9 de la DDNM. Visant surtout à enrichir le débat politique et l’action publique d’une pluralité d’expertises solides, ces assemblées devront rester ouvertes à des points de vue hétérodoxes et critiques, bien que sérieux et respectueux d’une certaine éthique, et leur action devra être sans incidence sur la légitimité des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire de l’État. La possibilité de les réunir occasionnellement dans un même cénacle permettra aussi d’offrir un nouveau support aux expériences consultatives et participatives propres à notre époque.

L’article 3 donne le nom de gardes citoyennes aux « corps indépendants et autonomes de contrôle » voulus par l’article 12 de la DDNM. Il énonce les principes et procédures à suivre pour garantir que ces instances émanent spontanément des citoyens, qu’elles demeurent indépendantes de toute influence partisane et qu’elles soient effectivement en mesure de surveiller la conduite des affaires publiques dans toutes leurs composantes (c’est-à-dire non seulement les choix et comportements du personnel politique mais aussi ceux des acteurs économiques, sociaux, médiatiques, etc.). Ce dispositif doit assurer un degré minimal de confiance entre citoyens et décideurs, étant supposé qu’une telle confiance ne peut perdurer si les premiers ne se sentent pas en capacité réelle de demander des comptes aux seconds. Il constituera ainsi un mode d’exercice continu de la souveraineté par le peuple.

Les titres II (articles 4 à 14) et III (articles 15 à 23) réforment largement les pouvoirs exécutif et législatif ainsi que leurs rapports mutuels.

Les articles 4 à 6 redéfinissent le mandat du président de la République. Leur apport le plus notable est de mettre fin au système du quinquennat, dont les failles paraissent aujourd’hui flagrantes tant pour les défenseurs de la conception gaullienne de cette fonction que pour ceux d’un parlementarisme plus affirmé. Il est proposé de donner davantage de hauteur à cette institution, dont le rôle de garante de l’unité et de la cohésion du pays figurera expressément à l’article 5 de la constitution, au travers d’un mandat d’une durée non renouvelable de dix ans – cette limitation exprimée en nombre d’années d’exercice et non plus de mandats laisse volontairement ouverte la possibilité d’une réélection à la suite d’un départ anticipé. Par ailleurs, le président de la République devra désormais être élu à la majorité absolue des votants et non plus des seuls suffrages exprimés. Avec la prise en compte des votes blancs ou nuls dans le calcul des résultats de l’élection, le chef de l’État ne pourra plus asseoir sa légitimité sur le simple rejet d’un opposant et sur une majorité relative acquise pour ainsi dire « par défaut ». Le degré d’approbation exigé pour exercer cette fonction est ainsi aligné sur l’importance décisive que la Ve République lui reconnaît.

Ce changement impose d’envisager une nouvelle hypothèse : celle dans laquelle aucun candidat à la présidence ne réunirait une majorité absolue de voix, même après un second tour. Dans un tel cas, l’article 7 prévoit la réunion des députés et des sénateurs en Congrès pour analyser la situation politique du moment et en tirer des conséquences concrètes, dans une séquence en deux temps : premièrement, en confirmant par un acte solennel l’élection du candidat le mieux placé ou, en présence d’une majorité absolue de votes blancs ou nuls traduisant un rejet général de l’alternative proposée, en lui substituant une personnalité restée en marge des campagnes électorales ; deuxièmement, en précisant l’étendue des pouvoirs du nouveau président pour la durée de son mandat, par la soumission de certains d’entre eux aux contreseings du Gouvernement ou par leur transfert pur et simple à ce dernier (sauf exceptions telles que celle prévue à l’article 8 s’agissant de la nomination du Premier ministre). Cette capacité du Parlement à recadrer les pouvoirs présidentiels et à leur donner une portée plus ou moins symbolique selon la légitimité du président élu permettra aux institutions de s’adapter aux circonstances du moment. Une nouvelle option sera ainsi proposée aux citoyens, avec les formats déjà connus du fait majoritaire et de la cohabitation. Cette balance des pouvoirs réduira les risques d’incompréhension et de frustration des citoyens dans leurs rapports avec leurs institutions, en veillant à ce que celles-ci reflètent la réalité et la qualité du personnel politique. À certains égards, elle fait écho à l’article 7 de la DDNM (« L’élection par les citoyens de représentants chargés de diriger l’État pour le compte de la Nation n’est légitime que si elle est utile, loyale, sincère et périodique. »).

L’article 9 réécrit l’article 11 de la constitution sur le droit du président de la République de soumettre un texte au référendum de sa seule initiative. Tout en recentrant son périmètre sur les questions institutionnelles et internationales, il tranche le débat désormais ancien sur l’interprétation de cette compétence en y incluant expressément les révisions constitutionnelles. Les autres matières (politique économique et sociale) et procédures (référendum d’initiative partagée) visées dans la rédaction actuelle de ce texte en sont pour leur part extraites, car renvoyées à d’autres dispositions. Cette clarification des pouvoirs de l’article 11 contribuera à celle de la fonction présidentielle, sous réserve de la procédure précédemment exposée.